Olfactory Tissue - Francais
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TRANSPLANTATION DE TISSU OLFACTIF POUR LES LESIONS MEDULLAIRES (PART 1)
 

LAURANCE JOHNSTON, PH.D.

Dans un article précédent sur l'aromathérapie, j'ai expliqué comment le tissu nasal capture les molécules odorantes et transmet l'information au cerveau qui affecte l'entièreté du corps humain. Les propriétés uniques de ces tissus sont qu'ils possèdent un potentiel régénérateur extraordinaire, ce qui mène les scientifiques à penser que cela peut être exploité pour restaurer la fonction après une lésion médullaire.

Partant des expérimentations animales, des scientifiques du Portugal, d'Australie, et de Chine, ont commencé à transplanter des cellules ou du tissu olfactifs sur le site lésionnel de patients accidentés depuis longtemps. La première partie de cet article qui en comprend deux va revoir les propriétés uniques des tissus olfactifs, la deuxième partie résumera les travaux réalisés sur l'homme par le Dr. Carlos Lima du Portugal.

INTRODUCTION:
Le tissu olfactif couvre à peu près 2,5 centimètres 1 centimètre au dessus de chaque cavité nasale. Intégré à ce tissu, les neurones olfactifs bipolaires, qui commencent à la surface du tissu sont composés de :
1° les dendrites, sorte de cheveux qui reçoivent les molécules informatives
2° le noeud olfactif auquel sont attachées les dendrites
3° le corps cellulaire, contenant le noyau du neurone et le centre métabolique
4° les axones conducteurs des signaux
Des récepteurs sur les dendrites en surface capturent les molécules odorantes que nous respirons, dendrites qui, comme une clé ouvrant un verrou, génèrent des pulsations nerveuses conduites au cerveau par l'intermédiaire des axones.

Ces axones sont réunis sous forme de bottes qui sont entourées par des cellules olfactives engainantes, un type particulier de cellules gliales, ou cellules-support des neurones, qui guident l'axone et supporte son élongation. Ces bottes partent de la base du tissu et traversent la boite crânienne à travers un trou appelé « plaque cribriforme ». Ensuite, elles pénètrent le bulbe olfactif du cerveau, une station relai où ils se connectent à des neurones de second ordre qui mènent à d'autres zones du cerveau via le faisceau olfactif.

On peut comparer le neurone olfactif à un chien ventru avec une longue queue qui passe par le trou d'un mur. Le côté chien représente le tissu olfactif du nez et le côté queue le bulbe olfactif du cerveau. Le mur représente la barrière cranienne. A part pour sa queue, le chien se tient du côté tissu olfactif. Ses moustaches correspondent aux dendrites, sa tête est le noeud olfactif, le fait qu'il soit ventru fait allusion au corps cellulaire contenant le noyau, et sa longue queue représente l'axone.

Lorsqu'une mouche (une molécule odorante) vient stimuler ses moustaches, son nez lui chatouille, ce qui donne un frisson (l'influx nerveux) qui descend rapidement le long de son corps jusqu'à un frémissement de la queue de l'autre côté du mur. Ces frémissements exitent des chiens qui vivent de l'autre côté (les neurones de second ordre, côté cerveau), qui à leur tour éveillent tout le voisinage (le cerveau puis le corps).

Les scientifiques sont intéressés par le tissu olfactif parce que, contrairement à la moelle épinière, il contient énormément de cellules ayant un potentiel régénérateur, en ce compris une source renouvellable de neurones, des cellules souches progénitrices, et des cellules olfactives engainantes remyélinisantes.

LES NEURONS OLFACTIFS:
Ils sont exceptionnels de plusieurs manières. Par exemple, la plupart des nerfs font soit partie du système nerveux central – càd le cerveau et la moelle épinière – soit du système nerveux périphérique qui connecte les organes et les extrémités au système nerveux central. Chaque environnement d'un système cellulaire est hostile aux autres nerfs. Par exemple, une lésion des nerfs périphériques va cesser de repousser lorsqu'elle atteindra la moelle épinière. A contrario, la classification des neurones olfactifs est ambigüe, ils sont installés à la fois dans le système nerveux central et dans le système nerveux périphérique.

Autre exemple, les neurones olfactifs sont les seuls neurones de surface du corps humain à être en contact direct avec l'environnement extérieur, en l'occurence, l'air que nous respirons. Comme toutes les cellules de surface, ils se régénérent et se reproduisent facilement, se renouvelant à peu près tous les 60 jours pendant toute la vie. Dans le tissu olfactif, il y a toujours des neurones à différents stades de leur neurogénèse. Une fois devenus neurones matures, ils migrent de leur base vers le tissu de surface et remplacent les neurones matures qui meurent d'apoptose, une forme de mort cellulaire programmée.

LES CELLULES SOUCHES OLFACTIVES:
La source de ces nouveaux neurones est un bassin de cellules souches progénitrices qui est situé à la base du tissu. Grâce à leur potentiel de se différentier en cellules qui peuvent traiter les désordres neurologiques ; les cellules souches ont été le centre d'intérêt de beaucoup de recherches, mais également de controverses car elles sont souvent isolées à partir de tissus foetaux, chose que les cellules souches dérivées des stigmates olfactifs évitent.

LES CELLULES OLFACTIVES ENGAINANTES:
Le potentiel de régénération axonale est amélioré grâce aux cellules olfactives engainantes qui :
1° sans être elles-mêmes des neurones olfactifs, produisent des gaines de myèline isolante autour des axones endommagés qui repoussent dans la moelle épinière,
2° secrètent différents agents neurotrophiques améliorant la repousse,
3° produit une structure et une matrice de macromolécules qui crée un support pour l'élongation axonale.
Grâce à ces caractéristiques, les cellules olfactives engainantes favorisent la repousse axonale, même lorsqu'elles sont implantées dans des endroits qui ne régénèrent pas facilement, comme la moelle épinière. Par exemple, on a montré que les axones de la moelle épinière remyélinisés par les cellules olfactives engainantes pénètrent la cicatrice gliale inhibitrice sur le site de la lésion, et migrent vers leurs cibles appropriées, restaurant la fonction.

Pour un axone coupé qui tente de repousser à travers la cicatrice gliale, l'équivalent physiologique est une lapidation, les pierres étant représentées par les molécules inhibitrices de la cicatrice gliale qui empêchent le passage de l'axone. A cause de cette lapidation, le tronc axonale se retire dans un endroit sûr. A proprement parler, l'implantation de cellules olfactives engainantes fourni une armée de boucliers qui permet à l'axone de surmonter cette lapidation de molécules inhibitrices, de passer à travers l'obstacle pour se retrouver de l'autre côté chez lui dans un environnement plus réceptif.

De plus, des neurones structurellement intacts continuent à traverser la cicatrice gliale, la majorité d'entre eux ne sont plus conducteurs parce qu'ils ont perdu leur myéline. En fournissant une nouvelle isolation de myéline qui restaure la conduction, les cellules olfactives engainantes viennent encore à la rescousse.

Etant donné qu'un petit nombre de neurones (10 à 15%) est nécessaire pour permettre un retour de fonctions significatif, ces propriétés cumulées du tissu olfactif qui favorise la régénération annoncent beaucoup de promesses pour les lésions médullaires.

ETUDES ANIMALES:
Beaucoup d'études animales documentent le potentiel du tissu olfactif à restaurer la fonction après lésion médullaire.
Dans une étude clé en 1994, les Dr. Ramon-Cueto et Nieto-Sampedro (Madrid) ont coupé les racines nerveuses dorsales de rats à l'endroit où les nerfs sensitifs se connectent à la moelle épinière. Après avoir reconnecté ces nerfs, ils ont implanté des cellules olfactives engainantes, ce qui a permis une repousse en arrière dans la moelle épinière, chose qui n'arrrive pas en temps normal.

En 1998, le Dr. Imaizumi et ses collègues (PVA/EPVA Centre de recherche pour le Neuroscience et le Régénération – Université de Yale) et le Dr. Li et al. (London) ont indépendament montré expérimentalement que les cellules olfactives engainantes peuvent remyéliniser la moelle épinière lésée du rat.

En 2000, Le Dr. Ramon-Cueto et al. a montré que les cellules olfactives engainantes injectées dans une section de moelle épinière de rat peuvent provoquer une repousse axonale à travers la cicatrice et une amélioration fonctionnelle, en ce compris, la marche, soutenir se tenir debout, et la perception sensorielle.

L'année dernière, le Dr. Lu et al. (Australie) a montré que les cellules olfactives engainantes provoque la régénération et la marche chez le rat blessé médullaire 4 semaines après avoir lésé le rat (modèle animal de lésion chronique).

Actuellement, dans le laboratoire du Dr. Peduzzi (Université d'Alabama – Birmingham) le Dr. Lima supervise des rats blessés médullaires chroniques (anciennement accidentés) qui ont été transpalntés avec leur propre tissu olfactif ; pas seulement des cellules olfactives engainantes, mais également des neurones régénérants et des cellules souches. Ces études sont essentielles en vue d'une approbation par la FDA d'essais cliniques pour reproduire les essais portugais de l'équipe du Dr. Lima.

TRANSPANTATION HUMAINE:
Puisque c'est le patient lui-même qui est la source du matériel de transplantation (greffes autologues), il n'y a pas besoin de thérapie immunosuppressive pour diminuer les risques de rejet. Les tissus du patient sont obtenus par simple biopsie au niveau du nez, ce qui n'affecte pas les capacités olfactives à long terme. Cette procédure est clairement préférable à celle de pénétrer le crâne pour accéder au bulbe olfactif, source de cellules olfactives engainantes de beaucoup de recherches animales.

Les scientifiques ont transplanté des cellules olfactives engainantes et du tissu olfactif chez des patients blessés médullaires. Par exemple, au Portugal, le Dr. Lima a réalisé des greffes autologues de tissu olfactif chez 7 patients. Le Dr. Lima pense que plus d'un seul type de cellules est nécessaire pour maximiser la régénération de la moelle épinière lésée ; en plus des cellules olfactives engainantes, des neurones à différents stades de leur développement, et des cellules souches progénitrices. Le Dr. Lima retire environ 25% du tissu olfactif des patients qui est ensuite haché puis implanté dans la moelle épinière.

D'un autre côté, en Australie, le Dr. Alan MacKay-Sim et son équipe a implanté dans la moelle épinière les cellules olfactives engainantes du patient préalablement mises en culture et isolées. Les scientifiques sont par nature concernés par les liens de causes à effets dans le sens où une telle approche permet de réduire les risques de confusion entre les facteurs qui peuvent agir entre eux.

En Chine, le Dr. Hongyuan Huang offre une troisième approche. Il a transplanté des cellules olfactives engainantes isolées à partir de tissu foetal sur plus de 150 patients. Grâce à la nature indifférentiée du tissu foetal, les médicaments d'immunosuppression ne sont toutefois pas requis.

Bien que ces efforts préliminaires soient prometteurs, beaucoup de choses doivent encore être apprises avant de prononcer un jugement définitif sur le réel potentiel thérapeutique. Par exemple, dans certains cas, l'intervention permet une décompression de la moelle épinière qui débouche elle-même sur une récupération fonctionnelle.

CONCLUSION:
Les preuves que le tissu olfactif et les cellules engainantes ont un potentiel considérable de réparer les lésions traumatiques de la moelle épinière augmentent. En partant de ce potentiel, les scientifiques ont commencé à traiter les patients souffrant de lésions chroniques de la moelle épinière, en ce compris le Dr. Carlos Lima, du Portugal, dont nous résumerons les travaux dans la deuxième partie.

(Adapted from article appearing in Paraplegia News, March, 2003)

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